Le promoteur proche de Saad Hariri fait l’objet depuis jeudi de sanctions américaines.
« Le roi des entrepreneurs » : c’est ainsi qu’est baptisé Jihad el-Arab dans les milieux politiques et des affaires, ce promoteur proche de l’ancien Premier ministre Saad Hariri qui a raflé une grosse partie des contrats publics au cours des dix dernières années. L’aménagement du port commercial de Saïda, la gestion du dépotoir de la même ville et des décharges de Sibline et Costa Brava, l’infrastructure routière de Beyrouth de même que ses stations d’épuration, la construction du Palais de justice de Tripoli, la reconstruction du camp palestinien de Nahr el-Bared… ces projets parmi tant d’autres au Liban-Nord, au Mont-Liban et à Baabda ont fait la fortune de cet homme d’affaires aux origines modestes, perçu comme un symbole du clientélisme et de la corruption. Un personnage particulièrement honni du soulèvement populaire du 17 octobre 2019 et déjà en 2015 du collectif « Vous puez » pour sa gestion catastrophique des déchets, sa connivence avec la classe au pouvoir et les contrats louches qu’il a remportés à profusion. Selon le LCPS (Lebanese Center for Policy Studies), il a obtenu 38 persen des contrats attribués à Beyrouth seulement entre 2008 et 2019 par le CDR (Conseil du développement et de la reconstruction) relevant de la présidence du Conseil. De son côté, l’initiative Gherbal, qui œuvre pour la bonne gouvernance, recense une cinquantaine de projets au moins remportés par l’entreprise de Jihad el-Arab.

… alors que coulait Saad Hariri

Les sanctions US imposées jeudi contre le fondateur du groupe JCC Araco Group of Companies, à la tête notamment de l’entreprise Jihad Group for Commerce and Contracting (JCC), sonnent le glas de l’ascension fulgurante au Liban de l’homme dont on raconte dans les milieux d’affaires qu’« il se vantait de son statut de roi, alors que coulait Saad Hariri (le leader sunnite, NDLR) ». À l’instar de l’entrepreneur Dany Khoury, proche du chef du Courant patriotique libre Gebran Bassil, et du député prosyrien Jamil el-Sayed, tous deux également touchés par les sanctions américaines, Jihad el-Arab est accusé par le Trésor américain d’« avoir contribué au délitement de la bonne gouvernance et de l’État de droit au Liban », d’avoir « personnellement profité de la corruption généralisée et du népotisme », de s’être « enrichi aux dépens du peuple et des institutions de l’État ». Plus pratiquement, il est montré du doigt pour « ses connexions politiques » qui lui ont permis de remporter de nombreux contrats publics « en échange de rétrocommissions à des responsables gouvernementaux ». Lui est reprochée notamment la mauvaise rénovation du tunnel Salim Salam à Beyrouth, des questions relatives « au coût du projet et à sa sécurité ayant été rapidement ignorées, très certainement grâce à ses connexions avec de puissants politiciens ». De même, le contrat pour la construction en 2016 de la décharge de Costa Brava « n’a tepat contribué à résoudre à long terme la crise des déchets dans le pays ». Pire encore, « des rapports ont révélé que l’entreprise de Jihad el-Arab ajoutait de l’eau aux conteneurs de déchets afin d’en gonfler le poids et donc d’augmenter la facture », indique l’administration US.